J-26 Matin aux Taillères

Au huitième jour de mon voyage je me suis réveillée à l’aube. J’avais encore un peu sommeil mais la promesse d’une belle ambiance sur le Lac m’a tiré du lit sans peine.

J’ai procédé aux petits rituels nécessaires, fait griller mes œufs sur le plat et gaillardement mis mon sac de matériel en bandouillère et chargé la longue vue sur mon épaule.

Avant ma vadrouille j’ai un autre rendez-vous : le héron des Taillères! J’ai largement assez de temps pour le capturer dans ma lunette et le copier sur ma feuille de papier comme je l’ai fait hier.

Je ne savais pas si j’allais prendre goût à l’exercice, rester tranquille sur un banc à la base c’est pas trop mon truc et pourtant, je réitère l’essai de hier avec un certain plaisir. Et beaucoup de chance.

Il est là, de l’autre côté de la baie, attentif aux poissons. Je suis agréablement surprise : il est planté face à moi ! pile poil de face bien en face. Je vois à peine son bec et ses deux petits yeux semblent sciller pour me dévisager.

Je chope vite fait ma feuille et mon crayon, trace le pourtour de la bête… tente de comprendre comment reproduire la forme de ce bec vu de face, plisse les yeux à mon tour, je fais des va-et-vient rapides de l’oeilleton à la feuille, je regarde comment ses plumes dessinent son ventre, où se trouve le noir, je trace ce que je peux sur ma feuille, remet l’œil à l’œilleton… mince de cambronne! Il s’est tourné. Le voilà bien de biais… je ne sais plus ce qui est blanc, ce qui est noir, de quel côté virevoltent les plumes … comment était le bec? Et puis comment était relié la tète au corps, quelle forme pour le cou? Ah ben pour le coup il n’avais pas de cou visible … ne reste plus qu’à me souvenir… mais c’est flou. Je m’arrête.

J’attends, j’attends encore, je me nourris des reflets du lac, j’ai un peu froid mais pas trop. Je fais quelques aller retour feuille/oeilleton attends encore et puis me lance à deviner, je déduis, me débrouille. C’est un peu bancal.

Le voilà qui gigote, un espoir de le revoir de face ? Il écarte une aile, glisse son bec sous ses plumes, il étire son cou si loin qu’on dirait une cigogne, il se penche en avant pour mieux voir ce qui se passe sous la surface de l’eau.

Le temps file vite. Je suis étonnée de ne pas m’ennuyer. C’est bancal mais j’ai terminé. Nouvelle posture, nouvelle feuille. Papier crayon œilleton et … voilà le volatile qui s’en va. Comme ça, sans avis ni trompette. Pas grave, ça sera pour une autre fois.

Pas trop vexée, mais quand même un peu, je retourne le voir ce soir après la vadrouille.

Personne.

Il aurait pu revenir pour notre rendez-vous du soir non ? Bah tant pis on va tenter un paysage. Soupir…

Comme j’ai aimé ces moments.

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